Depuis que j’avais récupéré mon petit bébé fin septembre, je réfléchissais à un port d’attache. La Rochelle et son port des Minimes étaient pas mal mais je dois avouer que je n’étais pas entièrement satisfait : le coût de la place restait élevé, le bateau restait tout le temps dans l’eau et la carène se salissait très rapidement. Sans compter que le bateau risquait d’être abimé en cas de mauvais coup de vent. En étant à 500 km de La Rochelle, il n’était pas facile pour moi d’aller vérifier les aussières tous les 4 matins. C’est donc tout naturellement que je me suis orienté vers Lorient : l’accès est tout aussi facile que La Rochelle (3h40 de TGV depuis Paris), la zone de navigation est beaucoup plus sympa (Ile de Groix, Belle Ile, le Golfe du Morbihan, Concarneau, les Glénans, etc.…) et surtout, à Lorient, il existe un pôle d’entrainement hyper actif. L’idée était donc d’utiliser la structure proposée par AOS pour baser mon Napadelis. Pour un prix annuel tout à fait raisonnable, AOS propose aux compétiteurs professionnels et amateurs un pôle course au large axé autour d’entrainements encadrés et d’un forfait logistique avec mises à l’eau et sorties de l’eau à volonté. Le bateau est stocké à sec, sur son ber, et l’équipe technique s’occupe de mettre le bateau à l’eau avant l’arrivée du skipper et de le sortir de l’eau le lendemain de son retour. Le bateau est ainsi en sécurité et au sec.
Le ber récupéré (merci Bertrand) et monté pendant les vacances de Noël, il me restait à convoyer le bateau de La Rochelle à Lorient : 140 milles environ. Pas facile de trouver une fenêtre météo en plein hiver…et si possible un week-end. Avant Noël, j’avais eu Bruno au téléphone (un des équipiers de Iemanja lors de la traversée vers le Brésil) qui m’avait dit vouloir essayer mon petit bolide. Le pauvre n’avait pas vraiment prévu que je lui propose une navigation de plus de 24 heures en plein hiver mais il est venu. Nous nous étions calé sur le week-end du 16-18 janvier et coup de chance, un vent de Sud Ouest était annoncé. Le seul bémol : une sérieuse dépression était également prévue pour samedi 19h à Lorient. Nous avions donc un temps limite pour arriver avant le coup de vent.
Rendez-vous donc le vendredi matin à 7h20 gare Montparnasse. Il est super ce premier TGV . Un peu matinal à mon goût mais, au moins, à 11h nous étions à bord. Le temps de tout préparer, nous sommes sorti avec la marée vers 12h30. Cap au 270 pour contourner l’ïle de Ré par l’extérieur. La météo avait annoncé de la pétole pour le début de notre navigation mais mon petit moteur acheté d’occasion fonctionnait à merveille. Vers 16h, le vent était établi autour de 10-12 nœuds. Napadélis filait à 6-7 nœuds sous grand-voile haute et gennaker : que du bonheur. Le djenek’ (comme on dit) est une sorte de grand génois qui se monte sur le bout dehors. Cette voile d’avant permet de naviguer au vent de travers avec un maximum de surface de voile. C’est très pratique dans le petit temps mais je peux également la garder quand le vent monte à condition d’abattre un peu (plutôt grand largue). A 18h, au couché du soleil, nous avons commencé nos rotations des quarts : 2 heures chacun notre tour : un gars à l’intérieur qui se repose, un autre sur le pont qui manœuvre ou qui barre. C’était parti pour une nuit de 14 heures. Température extérieur (et intérieur aussi ;-)) : 8°.
Vers 4 heures du mat’, c’était à nouveau mon tour d’être de quart. Le vent avait monté doucement : 25 nœuds. Napadélis était toujours sous djenek’ mais avec un ris dans la grand-voile. La vitesse de croisière était alors autour de 8 nœuds avec des pointes autour de 10 nœuds sur les vagues. Tout allait bien. Par contre j’aurai du commencer à me méfier quand, vers 5 heures du mat’, j’ai vu 30 nœuds s’afficher sur l’écran de l’anémomètre. Ça filait vite. Napadélis, matôssé à bloc (tous les bidons d’eau, le matériel du bord et nos sacs étaient positionnés au vent pour augmenter le couple de rappel) commençait à partir dans des surfs. D’un seul coup, sous l’effet de la compression, le bout dehors s’est brisé en deux. Le djenek’ qui n’était alors plus retenu, est parti sous le vent. En moins de 2 secondes, nous étions couché sur l’eau, le mât quasiment à l’horizontal. Je vous assure, en pleine nuit noire, ça surprend ! Disons que le réveil de Bruno a été quelque peu brutal. En plus, en étant à l’intérieur, il ne savait pas ce qu’il se passait à l’extérieur et pourquoi le bateau s’était couché. Nous sommes restés environ 2 minutes dans cette position que je qualifierai d’inconfortable (et 2 minutes, ça parait très long…) jusqu’à ce que je réussisse à affaler le gennaker. La situation en elle-même n’était pas très critique mais le risque était que la voile chalute et là, il aurait été impossible de la ramener à bord. Nous avons repris nos esprits tranquillement, Bruno est allé vomir tranquillement aussi (le pauvre a eu le mal de mer à partir de ce moment là), puis nous avons installé le foc et continué notre route.
A 13 heures, après avoir longé Belle Île en profitant du levé de soleil, nous étions à Groix (pour ceux qui ne connaissent pas c’est juste en face de Lorient) pour une escale-resto bien méritée.
Petite traversée d’une heure pour rentrer à Lorient. A 17h, Napadelis était au ponton d’AOS, un peu balafré, son équipage fatigué mais fier de la moyenne et content de la nav’ réalisée.
Ce convoyage effectué en « mode course » a été plein d’enseignements :
1/ Quand tu navigues la nuit, même si tout va bien, il vaut mieux s’attacher et mettre son gilet. Je n’avais rien de tout ça quand le bateau s’est couché. Bien Jib !
2/ Quand le vent monte sous gennaker, il vaut mieux abattre un peu et surtout ne pas laisser le bout dehors trop dans l’axe. L’espar a cassé sous l’effet de la compression. Plusieurs raisons :
- Je n’avais pas mis assez d’angle (bout dehors trop dans l’axe) ou alors le taquet qui bloquait le bout qui retenait le bout dehors a un peu « rendu » : il vaut mieux l’assurer autour d’un winch.
- Le bateau naviguait trop près du vent : il y avait trop d’efforts sur le bout dehors.
- Faire un point de positionnement sur la carte à la fin de sa pose avant de sortir prendre son quart. Je n’avais pas pris cette précaution du coup je ne savais pas si je pouvais abattre ou pas. J’ai voulu rester absolument sur la route donc je naviguais trop près du vent.
Voici quelques photos du pôle d’entrainements AOS. Dans un prochain article, je vous annoncerai le programme de ma saison 2009 et les « petites bricoles » à faire sur mon mini cet hiver.
A bientôt sur les pontons.
Jib
Lanterne éclairée. Merci Jib.
Rédigé par : Stéph K. | 24 février 2009 à 09:02
Salut Steph',
Alors la différence entre un gennaker et un spinnaker ? Disons que les deux sont des voiles dites "de portant" qui permettent d'accélérer dès que l'on s'écarte du vent. Le gennaker permet d'accéler lorsque le bateau est entre 70 et 130 degrés du vent (plus le vent est fort plus l'angle est important). Le spinnaker est plus une voile de vent arrière donc entre 120 et 160 degrés du vent. Un spinnaker est beaucoup plus grand qu'un gennaker.
Voilà, j'espère avoir éclairé ta lanterne.
Rédigé par : Jib | 18 février 2009 à 21:52
Hello Jib,
Sympa ta rubrique... ça donne un petit côté pro qui te va bien. Bilou et sa baleine n'ont qu'à bien se tenir!!! Y'a de la compette...
Au fait, c'est quoi la différence entre un spinnaker et un gennaker? Bises. Steph K.
Rédigé par : Steph K. | 15 février 2009 à 18:54