Crédit photo : Mélanie BAHUON - www.melaniebahuon.com - +336 63 96 79 95
Désolé de ne pas avoir pu mettre le blog à jour plus tôt. Le programme de ces deux dernières semaines a été particulièrement chargé. J'espère que vous avez pu suivre l'évolution de la course sur le site de la Transgascogne.
Pour résumer cette première expérience de course au large en tant que skipper, je dirais que c'est un truc de malades. Il faut avoir un gros mental pour donner le maximum de soi pendant les 3 ou 4 jours que dure une étape. Ces deux étapes de la Transgascogne 2009 ont été l'occasion pour Philippe et moi-même d'apprendre et d'enrichir notre expérience pour progresser le plus rapidement possible car les meilleurs sont franchement très bons et sont sur le circuit depuis au minimum 3 saisons. Retour sur les temps forts de cette belle course.
Samedi 1er août : le prologue
Comme je le disais dans mon message précédent : le prologue est uniquement une course spectacle sans enjeu de classement mais où tous les équipages ont envie de donner le meilleur d'eux-mêmes. Certains emmènent leurs sponsors et il n'est pas question pour eux de se prendre une bâche. Pour Philippe et moi, le prologue était surtout l'occasion de jauger nos concurrents, d'évaluer la vitesse de Napadelis et de se caler pour optimiser les manoeuvres. En tenant la troisième place jusqu'au passage de la dernière bouée malgré un départ moyen, on peut dire que mon Mini était loin d'être ridicule. Nous avons résisté au retour des meilleurs équipages qui avaient pris des départs encore moins bon et au final, notre quatrième place nous a rassuré sur notre potentiel. La vitesse du bateau est très satisfaisante malgré une grand voile qui a environ 8 000 milles au compteur et des spis un peu dépassés en terme de dimensions et de profils.
Dimanche 2 août : le départ vers l'inconnue pour la première étape (Port Bourgenay - Ribadeo : 385 milles)
Le parcours concocté par Denis Hugues, le directeur de course, envoyait la flotte contourner Belle Ile avant la traversée du Golfe. Le matin, nous avions encore potassé les fichiers météo pour préparer au mieux cette traversée du Golfe de Gascogne qui s'annonçait musclée : du près vers l'Ouest dans un vent assez soutenu pour d'une part contourner un anticyclone positionné dans le Sud du Golfe et d'autre part aller chercher une bascule de vent qui nous permettrait de débouler sous spi vers l'Espagne. Pas facile comme première expérience. C'est remonté à bloc que nous avons pris le départ à 12h02...un de mes plus mauvais départ de ma carrière je dois bien le dire. Notre vitesse et surtout notre hargne nous ont permis de grignoter les places jusqu'à Belle Ile mais ensuite nous avons d'une part eu une avarie de bout dehors (vite réparée avec un gros tournevis pour remplacer l'axe qui n'avait pas résister aux tensions) et d'autre part nous sommes passés trop près de Belle Ile. Nous nous sommes retrouvé dans le dévent de l'île. C'est vrai que la nuit noire ne nous a pas permis de repérer le point de passage optimum mais on a été naïf en voulant passer aussi près. Au Nord de Belle Ile, le lundi matin, nous avions déjà pris deux heures de retard par rapport aux premiers bateaux de série...mais nous étions toujours à bloc. On se disait qu'il restait encore 300 milles pour revenir sur la tête de course et mon Mistral barré par Philippe et moi s'est montré très rapide au près. Nous avons rattrapé puis doublé plusieurs mini qui n'ont rien pu faire pour résister. Les conditions météo étaient viriles : de la pluie, 25 noeuds de vent, les vagues qui submergent le pont et le barreur (une toutes les 2 - 3 minutes), un à deux ris dans la GV et un ris dans le solent. 36 heures à ce régime sans pouvoir faire chauffer d'eau tellement le bateau saute dans tous les sens. Nos quarts de deux heures nous permettaient de rester dynamiques sur le pont et de se reposer dans "le tambour de la machine à laver". Le mardi à 12h30, nous avons enfin virer vers le Sud avant de toucher la bascule le mercredi matin...et là ça accélère très fort. A 7h30, il nous restait 100 milles à faire (en ligne droite). Napadelis sous grand spi (83m²) et GV haute nous a offert de grosses sensations : des pointes à plus de 16 noeuds, une vitesse moyenne autour de 10 noeuds. A 21h30, nous sommes arrivés à Ribadeo, trempés, un peu hagard mais avec le sentiment d'avoir pas trop mal navigué (mis à part le départ et le passage de Belle Ile). L'accueil espagnol a été fantastique : des zodiacs nous ont tracté jusqu'au ponton où le personnel du port prenait en charge notre bateau. Une tente était dressée sur le port où des boissons et des plats étaient servis pour l'arrivée de chaque concurrent. On était mouillé, on sentait mauvais mais on était content d'être là...d'autant plus que les parents Nobileau (Annette et Jean-Pascal, des amis du CVVX) étaient là avec leur Sigma 400 (voilier de 12 mètres) pour nous accueillir et nous dorloter.
L'arrivée à Ribadeo (Il vaut mieux avoir l'image sans l'odeur ;-))
Jeudi 6 et vendredi 7 août : Escale à Ribadeo, l'heure d'un premier bilan.
L'heure des festivités mais surtout un temps de pause consacré au repos et à l'entretien du bateau (réparation du bout dehors, d'un taquet, assêchage de l'intérieur du bateau). C'était également le moment de dresser un premier bilan et d'apprendre de nos erreurs. Lors de la première étape, nous avons été tellement focalisé sur la traversée du Golfe que nous en avons négligé toute la première partie jusqu'à Belle Ile et que finalement nous avions déjà perdu la course avant même d'avoir attaqué cette fameuse traversée. La première nuit, nous n'avons pratiquement pas dormi pour essayer de revenir sur la tête de course. Résultat, le lundi matin, nous étions tous les deux fatigués. Enfin, en arrivant à Ribadeo, une grosse bascule de vent nous a également fait perdre du temps. Pourtant, nous aurions du nous douter que les hautes falaises de la côte espagnole auraient une influence sur le vent. Malgré toutes ces erreurs, nous sommes 4ème à seulement 1h20 du troisième. Nous avons décidé de nous organiser un peu mieux pour l'étape de retour :
- Décomposer l'étape en plusieurs partie : la stratégie du départ et des premières heures de navigation, la stratégie de la traversée du Golfe et enfin la stratégie d'approche de Port Bourgenay.
- Rentrer dès la première nuit dans notre rythme de quarts de 2 heures.
Tenue officielle de rigueur pour la réception à la mairie de Ribadeo. Merci Muriel pour ce beau cadeau. On était les plus beau ;-)
Samedi 8 août : Etape retour Ribadeo - Port Bourgenay (285 milles). Objectif : le podium.
Cette fois, c'est Philippe qui barrait pour le départ et les premières heures de course. Un départ très propre à 13h02 dans 15 noeuds de vent. On a juste fait un petit contre bord de 3 minutes pour se démarquer de la flotte et aller chercher du vent frais. Notre stratégie était de remonter au près plein Nord pendant une soixantaine de milles pour aller chercher du refus puis de virer et il ne s'agissait pas de rester dans les dévents des petits copains pendant ce long premier bord. Au vent de la flotte (juste quelques dizaines de mètres), nous avions du vent frais et nous avons pu faire parler la poudre. Bateau matossé à tribord (tout ce qui est à bord du bateau est stocké dans des filets le long de la coque - à l'intérieur - pour aider au rappel), Jib suspendu aux filières (puis Philippe lorsque j'ai repris la barre vers 16h), nous avons déboité toute la flotte par la droite (la voie des bus comme on dit ;-)) et à 22h nous étions dans le tableau arrière de Thalmont St Hilaire (les vainqueurs de la première étape avec Claire Ferchaud une très bonne barreuse et Peter Laureyssens vainqueur de la Mini Transat 2005). Nous avions parfaitement géré la première partie de l'étape. Il restait maintenant à négocier le moment clé du virement de bord : un anticyclone de 1025 hp était au Nord de Ribadeo. En partant vers le Nord, nous nous rapprochions de l'anticyclone pour y trouver du vent refusant qui nous permettrait de virer de bord et de faire route vers Port Bourgenay. Virer trop tôt impliquait de faire une route plus longue. Virer trop tard risquait de nous voir arriver dans une zone sans vent car trop proche du coeur de l'anticyclone. Avant le départ, Jean-Pascal Nobileau (très bon navigateur), Philippe et moi avions décidé de monter au Nord d'une soixantaine de milles puis d'envoyer. A 22h, le baro était monté à 1023 hp (alors qu'il était à 1021 au moment du départ). Il était temps de virer. Philippe est descendu à l'intérieur dématosser (changer tous les poids de côté) avant de virer. A ce moment là, Thalmont St Hilaire a envoyé son virement. Nous avons viré 2 - 3 minutes après. Sans le savoir, nous venions de nous engager dans un duel de 270 milles nautiques. Pendant deux nuits et deux jours les deux équipages de Napadelis et de Thalmont se sont battus pour la gagne : 10 mètres pris par ci, 50 mètres perdus par là, etc... à tel point qu'à 20 milles de l'arrivée, nos deux bateaux étaient côte à côte et on pouvait même voir qui de Peter ou de Claire était à la barre. Au final, sur un petit manque d'expérience, nous nous sommes incliné de 8 minutes...mais nous avons colé près de 4 heures à l'équipage qui avait fait 3ème à la première étape. Nous étions sur le podium. La déception de ne pas avoir réussi à gagner cette étape n'est rien à côté de notre immense joie.
L'arrivée à Port Bourgenay : juste à l'heure pour la crèperie.
Lors de la remise des prix, mercredi soir, Denis Hugues n'a pas manqué de souligner cette perf' assez exceptionnelle : "Un podium pour une première course ! Pas mal les gars, c'est propre".
Cette Transgascogne a été pour moi une grande expérience :
- J'ai appris à connaitre et à apprécier Philippe Benaben contre qui j'ai beaucoup régaté mais que je ne connaissais pas vraiment.
- J'ai passé un moment de détente et de rires à bord d'Eliott à Ribadeo avec Jean-Pascal et Annette Nobileau.
- J'ai appris toutes les ficelles de la course au large en restant au contact et en observant pendant plus de 48 heures le Mini 548 Thalmont St Hilaire, un des meilleurs équipages en Mini actuellement.
2009 était une année pour voir et je crois que nous avons fait mieux que ça en terminant 3ème de cette course réputée difficile.
Dans un prochain message, je vous raconterai toutes les anecdotes de ces deux semaines...et il y en a.
Bon vent à toutes et à tous et encore merci pour les messages de soutiens que vous m'avez envoyé avant la course.
Un skipper heureux : Jib
PS : un grand merci à Marco qui a fait le convoyage retour avec moi. J'étais crevé, heureusement que tu étais là.
Crédit photo : Mélanie BAHUON - www.melaniebahuon.com - +336 63 96 79 95
Merci Mélanie pour tes photos. Elles sont superbes.
Bravo pour ton site, il est so chic!!! j'adooooooore...
A plus,
kty
Rédigé par : kty | 15 octobre 2009 à 22:51